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18 mai 2014 7 18 /05 /mai /2014 07:53

Quelques médias ont dernièrement commencé à se faire l'écho d'une discussion à l'Assemblée nationale visant à offrir, dans le cadre d'une famille recomposée, de nouveaux droits au beau-parent.

Il s'agit en fait de l'étude d'une proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant déposée récemment par des députés de la majorité.
Avec ce texte, les parlementaires souhaitent statuer sur certains aspects du droit de la famille laissés en attente du fait de l'abandon par le gouvernement d'un projet de loi plus large sur le sujet. Il est notamment question, sans aller jusqu'à l'instauration d'un véritable statut, de "reconnaître la place croissante prise par les tiers, les beaux-parents en particulier, dans l'éducation et la vie quotidienne des enfants, avec lesquels ils nouent des liens affectifs étroits et durables" en mettant à disposition "une palette d'instruments, souples, évolutifs et adaptables" afin "d'exercer en droit les responsabilités qu'il assument déjà en fait, dans l'intérêt de l'enfant".

Mais, les mesures envisagées ne se limitent pas à ce seul point. D'autres sujets, tout aussi importants, sont également abordés qu'il s'agisse d'apporter des précisions au droit en vigueur ou de véritables modifications. Tel est par exemple le cas de la proposition de réécriture de l'article 388-1 du code civil qui fixe les règles en matière d'audition de mineur dans toute procédure le concernant. Plus précisément d'en reformuler les grands principes en touchant au critère de la capacité de discernement.

 

En effet, actuellement, l'audition d'un mineur est notamment conditionné à l'existence d'une capacité de discernement de celui-ci. Un critère qui, comme le confirme les travaux préparatoires à l'élaboration de ce texte, donne bien souvent lieu à des interprétations "disparate d’un tribunal de grande instance à l’autre et selon les modes opératoires adoptés par les juges eux-mêmes"

Dans la version initiale de la proposition de loi, les auteurs n'exprimaient toutefois pas le souhait de revenir là-dessus mais simplement d'ajouter que le mineur devra être entendu d'une manière adaptée à son degré de maturité.
Pas forcément la meilleure manière de résoudre le problème ; bien au contraire.
Comme le faisait d'ailleurs justement remarquer le député Philippe Gosselin, "S’il y a des différences d’appréciation quant au discernement, il y en aura aussi quant à la maturité, qui sera prise en compte différemment selon les juges. Comme le discernement, la maturité est déterminée par un faisceau d’indices et n’est pas susceptible d’une définition rigoureuse."

 

L'examen du texte par la commission des lois de l'Assemblée nationale eut quant à lui pour effet de modifier profondément le contenu de l'article 388-1 du code civil en raison de l'adoption d'un amendement déposé par la rapporteure.
Il a concrètement pour objet de supprimer toute référence à la capacité de discernement en conservant uniquement le fait de devoir tenir compte du degré de maturité. Ce que la députée justifie en indiquant qu'il s'agit ainsi d'assurer "une meilleure prise en compte de la parole du mineur dans les procédures qui le concernent".

Ce qui revient donc à vouloir que, par principe, chaque mineur, quelque soit sa capacité de discernement, puisse être auditionné. Au juge ensuite à l'entendre en tenant compte de son degré de maturité.

L'amendement en cause prévoit toutefois également un garde-fou à la portée assez limitée. En effet, si l'audition resterait par principe de droit dès que le mineur en fait la demande, elle pourrait cependant être écartée à condition que le magistrat puisse démontrer dans une décision spécialement motivée que l'intérêt de l'enfant lui commande un tel choix. Pas si simple. Bien au contraire.

Les autres dispositions de l'article ne font actuellement pas l'objet de changement.

 

La modification a été adoptée et c'est cette version qui sera étudié par les députés en assemblée plénière à partir du lundi 19 mai. Mais, il est quasi certain que les choses ne resteront pas en l'état et que les règles concernant l'audition du mineur vont encore faire l'objet de l'attention d'un certain nombre de parlementaires. La discussion en réunion de commission permettent déjà de se rendre compte. Ainsi, le gouvernement, par la voie de sa nouvelle secrétaire d'état, ne s'oppose pas à une évolution des dispositions mais ne valide pas pour autant la suppression de la référence à la capacité de discernement. Il invite plutôt le législateur à trouver une nouvelle rédaction. D'ailleurs, si la rapporteure n'est pas allée jusqu'à retirer son amendement, elle semble avoir entendu le message.

De plus, une autre idée s'est manifestée au cours de l'élaboration du texte. Elle n'a cependant pas pu se développer, voire se concrétiser, en raison du retrait de l'amendement qui la contenait. Il était en l’occurrence également question d'intervenir sur la difficulté d'interprétation de la capacité de discernement du mineur. Le député Erwann Binet proposait d'instaurer une présomption de discernement en faveur de tout enfant qui demanderait à être entendu dans une procédure qui le concerne, comme le recommande le Défenseur des droits dans son rapport 2013 consacré aux droits de l'enfant (qui portait justement plus particulièrement sur la question de la parole de l'enfant en justice).

Enfin, tout cela a sans doute eu pour effet de réveiller le débat s'il en croit le nombre d'amendements déposés depuis à ce sujet en vue de l'examen en assemblée plénière ; même s'il faut bien reconnaître que certains ne sont que de vulgaires copier-coller.

 

L'étude de la proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant sera à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale dès demain, le 19 mai.

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