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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 15:55

Ce soir, après la diffusion d'un nouveau numéro de "Faites entrer l'accusé", Christophe Hondelatte animera un débat dont le contenu semble se résumer en une question : la Prison peut-elle changer un homme ?

 

Se poser la question, c'est déjà ne pas en être totalement sûr...

 

Pourtant, le jeune étudiant en droit apprend très vite en suivant les premières heures du cours de droit pénal général que l'incarcération n'est qu'une peine parmi tant d'autres visant notamment à sanctionner le comportement d'une personne lorsque celui-ci se trouve être constitutif d'une infraction parce qu'il porte atteinte à l'intérêt général.

 

Il découvre ensuite que la peine (et donc l'incarcération) a plusieurs fonctions ; certaines semblent logiques et sont connues de tous, d'autres un peu moins...

 

La première idée qui vient à l'esprit lorsque l'on parle de peine et notamment lorsqu'il s'agit d'envoyer quelqu'un derrière les barreaux, c'est bien sûr la répression.
En effet, l'infraction -le comportement de la personne- a causé un mal à la société ; pour le réparer, l'auteur des faits doit "payer sa dette"... Le ministère public, au nom et pour le compte de la société, doit lui infliger la peine qui convient à la situation en respectant les grands principes du droit pénal.

 

Mais, ce n'est pas tout...

La peine a aussi une fonction dissuasive ou intimidatrice.
Là, il s'agit de se tourner vers l'avenir : éviter que les faits soient de nouveau réalisé.
La prévention concerne dans ce cas aussi bien l'individu condamné que l'ensemble de la société.

 

 

Et le jeune étudiant en droit constate aussi que la peine a encore une autre raison d'être sans doute un peu moins concevable de nos jours : la réadaptation ou réinsertion du détenu...

L'institution judiciaire ne se contente pas de punir en voulant dissuader les membres de la société de commettre des actes répréhensibles.
En théorie, dès le prononcé de la peine, c'est un nouvel objectif qui s'annonce : préparer la sortie de prison, prévoir le retour le retour de l'auteur des faits dans la société (dont il est, même si certains en doute parfois, un des membres)

En effet, contrairement à ce que quelques personnes voudraient croire, une personne condamnée à une peine privative de liberté ne doit pas devenir un paria qui ne mérite plus d'appartenir à la société...

Elle porte atteinte à l'intérêt général, elle est condamnée pour cela, elle "paye sa dette à la société" et c'est tout : pas d'autre condamnation... du moins en théorie

 

Que chacun se rassure : la prise en compte de la victime est bien présente notamment depuis la loi dite "Perben II" qui a, entre autre, permis de consulter la victime sur le sort du condamné même pendant l'exécution de la peine.

 

L'étudiant n'oublie en général pas de retenir que tout cela est précisé dans les articles 132-24 du code pénal et 707 du code de procédure pénale ainsi que dans une décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 1994.

 

 

C'est donc un fait : la peine a notamment pour fonction de préparer la réinsertion du condamné.

D'ailleurs, l'article 1e de la loi du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire fixe clairement les missions de l'administration pénitentiaire : la participation à l'exécution des sanctions, la sécurité et la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire.

 

Si on se limite au volet qui nous intéresse, tout est prévu...du moins dans les textes ; les choses sont tellement bien faites que la plupart des dispositions sur le sujet sont regroupées dans un chapitre du code de procédure pénale sobrement intitulé "des actions de préparation à la réinsertion des détenus"...

 

Rien que l'indication des différentes sections donne envie de rêver :

 

- de l'assistance spirituelle

- de l'action socio-culturelle

- de l'enseignement et de la formation professionnelle

- des activités physiques et sportives

- de l'intervention socio-éducative

- ...

 

Bref, en théorie, tout est là pour recréer une société miniature, pour commencer le travail de réinsertion, pour multiplier l'effet resocialisant de la détention, pour aider l'individu incarcéré à se reconstruire...

 

Mais tout cela reste surtout théorique et la réalité est bien moins joyeuse...

Quant est il effectivement de toutes ces actions en milieu carcéral ?

Et ne parlons même pas des conditions de vie en détention, des suicides de détenu, de l'effet que cela peut avoir sur l'individu de vivre enfermé, de la qualité des soins, des détenus qui sont plus malades que coupables...

Et ne développons même pas sur le manque de moyens

Et puis, ceux qui disent que la prison est surtout l'école de la délinquance n'ont peut-être pas toujours tout à fait tort...

 

Et ne parlons même pas de l'image que peuvent avoir certains d'entre nous sur la population carcérale et sur la prison d'une manière générale.

 

[...]

 

Pour en revenir au débat de ce soir, en allant sur la page consacrée  à l'émission, on apprend que :

 

"La prison, Valérie Subra, Jean-Rémi Sarraud et Laurent Hattab l’ont fréquentée une vingtaine d’années.

 

Aujourd’hui, ils ont refait leur vie. Dans Faites entrer l’accusé, Jean-Rémi Sarraud raconte qu’il a payé sa dette, mais qu’il n’est plus le même homme. Il s’est marié en prison, avec une jeune fille qui venait le visiter. Il a eu un enfant mais les murs de sa cellule viennent encore le hanter. Grâce aux formations qu’il a suivies en prison, il travaille maintenant dans l‘informatique. Il lui a aussi fallu se reconstruire psychiquement après les deux meurtres auxquels il a participé. Un ami, aumônier l’y a aidé, en prison.

 

Comme lui, d’autres anciens détenus, tous criminels, viendront témoigner, sur le plateau de cette soirée spéciale, du travail de reconstruction, mais aussi de rédemption qu’ils ont du faire pour accepter leur peine et mettre à profit ce temps de réflexion… Quand d’autres viendront dénoncer le manque d’aide, dont ils ont souffert pour accomplir ce chemin et la force destructrice de l’enfermement. Ils pourront en débattre avec des représentants de l’administration pénitentiaire, des psychiatres spécialisés, ainsi que des avocats, et des aumôniers. Ensemble, ils tenteront de nous éclairer sur le travail qui est accompli ou non par l’administration pénitentiaire et la justice afin que les criminels puissent se réinsérer à leur sortie de prison."

 

Bref, pour certains, les bonnes personnes étaient là au bord du chemin..., la prison est parfois l'occasion de démarrer une nouvelle vie voire même de découvrir ce qu'est vraiment la vie y compris les règles qui l'encadrent.

Pour d'autres, cela semble plus compliqué

Mais pour tous, les choses ne sont pas simples

Même une fois sorti de prison, les murs ne sont jamais loin et le passé ne s'oublie pas comme ça.

 

La prison peut-elle changer un homme ?

Oui mais ce n'est pas si simple et le travail risque de devenir encore plus complexe au regard de la tendance scyzophénique qui d'un côté tend à toujours plus de facilité à l'incarcération et de l'autre dénonce le phénomène de surpopulation carcérale...

 

Ce genre d'émission aura peut-être au moins le mérite de rétablir certaines vérités, de casser un peu les fantasmes qui entourent la récidive, de redire encore et toujours deux ou trois choses sur la réalité du monde carcéral notamment sur le fond du sujet où presque tout reste à faire pour améliorer la situation.

 

Mais son premier mérite sera peut-être d'intéresser un peu plus les téléspectateurs au monde de la prison, à la vie des détenus, au travail des membres de l'administration pénitentiaire...

 

Ne fermons pas les yeux trop facilement sur ce sujet... bien au contraire...

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 07:30

On ose encore à peine le croire...

Et pourtant, cela semble se confirmer de plus en plus...

Ce que les nombreux amateurs de l'argumentation juridique n'ont pas réussi à faire, c'est la loi de la politique qui va finir par le provoquer...

 

Dès le départ -surtout à partir du jour où le président de la République s'est rendu à la rentrée solennelle de la Cour de cassation pour annoncer la mort programmée du juge d'instruction-, de très nombreux membres du monde judiciaire montrèrent leur hostilité.

Ces mauvais personnages montrèrent leur mécontentement en le criant dans la rue, sur les marches des palais de justice, devant la Cour de cassation...
Mais, la contestation émana aussi de très hauts représentants de l'institution judiciaire en avançant une argumentation juridique en grande partie basée la non-conformité des premières pistes de réforme à la convention européenne des droits de l'Homme...

 

Le temps passa...

La contestation continua, augmenta...

Chacun multiplia les annonces et autres commentaires

Et, un jour, l'avant projet de réforme fut annoncé et diffusé

La concertation sur le texte pouvait commencer même si certains la refusèrent...

 

La Cour européenne des droits de l'Homme confirma que le ministère public français n'était pas une autorité judiciaire compétente...

Le futur nouveau code de procédure devenait donc du coup contraire aux dispositions européenne mais des voix se faisaient encore entendre pour confirmer que tout allait très bien dans le meilleur des mondes...

 

Et puis, il y a la politique et ses raisons que la raison ignore parfois...

Et puis, il y eut des résultats d'élections qu'il n'est plus utile de commenter mais qui modifièrent encore un peu les choses et des bruits commencèrent à courir...

 

Ce fut alors au tour des magistrats de la Cour de cassation de venir critiquer le texte... ce qui provoqua tout de même quelques reculs...

 

Et puis, il y a la politique et ses raisons que la raison ignore parfois

Et puis, il y a un chef de l'Etat qui veut retrouver un peu de ceux qui ont cru en lui ; à commencer par les parlementaires... et c'est justement en venant leur dire quelques mots pour les rassurer qu'il aurait fait quelques pas de plus vers la longue route qui mène à l'abandon de la réforme de la procédure pénale telle qu'il l'aurait voulu...

 

"Pour moi, l'essentiel, c'est la sécurité, l'emploi, la crise, l'agriculture, la gestion des déficits et l'international", a-t-il déclaré en recevant les députés UMP à l'Elysée, sans citer dans ses priorités la réforme de la procédure pénale.

 

en précisant :

 

"La procédure pénale, c'est une réforme qui est importante" mais "c'est un monument". "On ne pourra pas la faire passer dans son intégralité d'ici à la fin du quinquennat"

 

il ajouta encore :

"dites à la garde des Sceaux ce que vous considérez comme prioritaire". Avant de lâcher qu'il serait "difficile de faire passer un bout" de réforme qui "déséquilibrerait" l'ensemble. "Il faut voir"...

 

 

Et comme un début de confirmation, Gérard Larcher, président du Sénat, précisa 

que l'ordre du jour du Sénat prévoyait l'examen du projet de loi de modernisation agricole (LMA) en mai, la deuxième lecture de la réforme des collectivités territoriales "fin juin et jusqu'en juillet", avec en juin un débat d'orientation budgétaire pour préparer le projet de budget 2011, le projet de loi sur le voile intégral et "l'amorce de la discussion sur les retraites" en septembre.

 

"Ensuite nous entrons dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) et le projet de loi de Finances 2011" 

Une manière de dire que la Loppsi2 déjà voté par les députés, et la réforme de la procédure pénale ne seraient pas en tout état de cause examinés cette année...

 

Ainsi, petit à petit, pas après pas, nous avançons sur la route qui mène à l'abandon de la réforme de la procédure pénale...

 

A noter également que le rapport du groupe de travail sur les aspects constitutionnels et conventionnels de la réforme de la procédure pénale, présidé par le professeur Yves Gaudemet, vient d'être remis au garde des Sceaux.

 


 

à lire aussi sur ce blog :

 

réforme de la procédure pénale : "on a eu chaud : on a failli appliquer une bonne idée du parlement"

"aucune affaire ne pourra être étouffée, à aucun stade de la procédure"

la rentrée solennelle de la Cour de Cassation n'a pas intéressé grand monde cette année...

le nouvel arrêt Medvedyev est arrivé...

et si le juge d'instruction vivait un petit peu plus longtemps que prévu...

je ne voudrais pas être Michèle Alliot-Marie en ce moment...

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6 mai 2010 4 06 /05 /mai /2010 12:15

Pour bien faire, mieux vaut commencer par le début...


 

L'intention semblait louable : la faille juridique permettant aux employeurs de proposer des reclassements indécents aux salariés licenciés pour motif économique avait été repérée ; le travail législatif allait corriger l'erreur...
Une proposition de loi fut alors déposée dans cette optique, examinée en commission et un peu modifiée avant d'être adoptée à la quasi-unanimité des députés.
Le Sénat finit à son tour par valider le texte avec tout de même une remarquable hostilité de la part des socialistes siégeant dans cette assemblée.

Et voilà qu'apparaissent les premières réactions...

 

 

Au nom du groupe PS, Jacqueline Alquier (Tarn), oratrice principale sur ce texte, estime dans un communiqué qu'il "n'apporte rien de concret aux salariés et constitue en fait la première étape du désengagement des employeurs de leur obligation de reclassement".

 

Selon elle, cette proposition de loi du Nouveau Centre "vise à éviter aux patrons" une "condamnation financière lorsque les offres de reclassement dans les pays à bas coût de main-d'oeuvre n'ont pas été présentées".

 

Elle vise aussi à éviter "l'impact dévastateur sur les salariés licenciés et sur l'opinion publique de l'information sur les niveaux de salaire pratiqués dans les pays émergents".

 

Xavier Mathieu, devenu presque malgré lui l'un des plus célèbres syndicalistes de France, dénonce une loi faite pour le MEDEF qui constitue un scandale entraînant purement et simplement la mort de l'obligation de reclassement.

 

 

 

Alors véritable avancée de la législation sociale en faveur des salariés ou simple tour de passe-passe cachant un cadeau pour l'employeur ?

 

 

Pour bien commencer, reprécisons le texte tel qu'il a été adopté par les deux assemblées :

 

Art. L.1233-4


Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéresse ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

 

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

 

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.



Art. L. 1233-4-1


Lorsque l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national, l'employeur demande au salarié, préalablement au licenciement, s'il accepte de recevoir des offres de reclassement hors de ce territoire, dans chacune des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.

 

« Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions susmentionnées, pour recevoir de telles offres dans un délai de six jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l'employeur. L'absence de réponse vaut refus.

 

« Les offres de reclassement hors du territoire national, qui sont écrites et précises, ne sont adressées qu'au salarié ayant accepté d'en recevoir et compte tenu des restrictions qu'il a pu exprimer. Le salarié reste libre de refuser ces offres. Le salarié auquel aucune offre n'est adressée est informé de l'absence d'offres correspondant à celles qu'il a accepté de recevoir

 


 

A première vue, l'obligation de reclassement semble toujours présente et son cadre législatif renforcé.

 

En s'attardant un peu plus sur le texte, on peut entrevoir le cadre fixé pour l'exécution de ce devoir de l'employeur :

 

- une offre de reclassement doit être écrite et précise

- elle doit concerner un poste dans l'entreprise ou à l'intérieur du groupe

- le reclassement proposé doit être sur un emploi de même catégorie ou équivalent assorti d'une rémunération équivalente ou, à défaut et avec l'accord exprès du salarié concerné, sur un emploi d'une catégorie inférieure.

 

Bref, quasi rien qui change par rapport à la version précédente ; à peine un tout petit détail... mais c'est peut-être bien lui qui risque d'entraîner quelques bouleversements...

 

Tout viendrait de l'ajout des mots "assorti d'une rémunération équivalente" dans le nouvel article L.1233-4...

Le moins que l'on puisse dire c'est que la notion est floue : qu'est ce qu'une rémunération équivalente ?
Les contentieux risquent de se multiplier et ce sont les juges qui, petit à petit, vont donner l'interprétation qu'il faut en avoir.

Notons tout de même que la rémunération équivalente n'est prévu qu'en cas de reclassement sur un emploi de même catégorie ou sur un emploi équivalent.

 

 

Et quant est-il du nouvel article L.1233-4-1 du code du travail ?

En effet, si le premier texte pose l'obligation de reclassement de manière générale en fixant le cadre législatif qui convient, la proposition de loi instaure un article ciblant très précisant une situation particulière.

 

Les nouvelles dispositions visent le cas spécifique où l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national et uniquement dans ce cas.
Que se passe-t-il alors ?

 

L'employeur a l'obligation de demander au salarié (préalablement au licenciement) s'il accepte de recevoir des offres hors du territoire et quelles pourraient être les restrictions notamment au regard de la rémunération et de localisation géographique. (rien n'est précisé quant au formalisme de la demande)

 

La balle est alors dans le camp du salarié :

 

- soit il accepte avec d'éventuelles restrictions ; il doit alors en informer l'employeur dans un délai de 6 jours ouvrables à compter de la réception de la proposition. (toujours rien de prévu quant aux conditions de forme)

 

- soit le salarié refuse.

Dans ce cas, deux possibilités s'offrent à lui : en informer l'employeur ou tout simplement ne pas donner suite puisque l'absence de réponse vaut refus.

 

Les offres de reclassement hors du territoire national (qui doivent être écrites et précises) sont ensuite proposées à ceux qui ont accepté de les recevoir (en tenant compte des éventuelles restrictions) ; ceux-ci restant libres de les refuser.

 

Et les autres (les salariés concernés par un licenciement économique ayant refusé de recevoir des propositions de reclassement hors du territoire national émanant d'une entreprise implantée hors du territoire national) ?

 

Deux interprétations semblent possibles dans ce cas :

 

- si on ne lit que l'article L. 1233-4-1 du code du travail, le constat est vite fait : rien n'est prévu ; le texte ne s'intéresse qu'aux salariés ayant accepté la demande de l'employeur.

On pourrait même conclure que l'employeur n'a plus d'obligation de reclassement à sa charge en ce qui concerne les salariés qui ont refusé sa proposition de recevoir des offres de reclassement hors du territoire national.

 

- mais si on pousse un peu plus loin le raisonnement et que l'on n'oublie pas que l'article L. 1233-4 est lié avec celui qui lui précède pour former une sous section intitulée "obligations d'adaptation et de reclassement"... bref, si on prend en compte le fait que l'on ne peut pas lire l'un sans l'autre, l'interprétation peut être différente :

 

L'article L. 1233-4 du code du travail fixe ce qu'on pourrait qualifier de régime général de l'obligation de reclassement alors que la disposition qui devrait compléter la sous-section ne concerne qu'un cas bien précis.

Et du coup, on peut conclure que, comme bien souvent en matière juridique, si l'exception n'a pas vocation à s'appliquer alors on en revient au principe.

Donc, il est possible de penser que si un salarié refuse la demande de se voir proposer des offres de reclassement hors du territoire national, c'est l'article L. 1233-4 qui doit être appliqué (puisque rien n'est prévu dans l'article L. 1233-4-1.)

 

Pour ma part, j'ai une petite préférence pour la deuxième solution.

D'ailleurs, rien ne dit qu'un salarié qui accepte de recevoir des offres hors du territoire national finira forcément par aller travailler à l'étranger ; bien au contraire : rien n'empêche qu'il soit reclasser dans un emploi situé en France.


 

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5 mai 2010 3 05 /05 /mai /2010 14:15

Il y a dans les ministères des rapports qui sont déposés et, parfois, on ne les retrouvent plus...
Il y a devant les assemblées des propositions qui sont déposées et parfois, on ne les retrouvent plus...

Cela doit sûrement être mal rangé...

 

 

Le temps est parfois très long entre la volonté politique de faire changer les choses et la concrétisation manifestée entre autre par l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi.


 

 

Le 13 mai 2009, une proposition de loi visant à garantir de justes conditions de rémunération aux salariés concernés par une procédure de reclassement est déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale.

L'unique article de ce texte est simple ; sa motivation la plus claire possible :

"corriger une faille législative dans notre droit du travail qui conduit certains employeurs à proposer à leurs salariés licenciés des procédures de reclassement humiliantes et inacceptables"

 

En effet, l'article L.1233-4 du code du travail prévoit une obligation d'adaptation de reclassement à la charge de l'employeur en cas de licenciement pour motif économique :

 

Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéresse ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.


Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.


Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

 

 

Une proposition de reclassement doit donc être faite au salarié licencié.

Celle-ci doit être faite en respectant les règles prescrites par le texte ; autrement dit :

 

- elle doit être écrite et précise

- elle doit concerner un poste dans l'entreprise ou à l'intérieur du groupe

- le reclassement proposé doit être sur un emploi de même catégorie ou équivalent ou, à défaut et avec l'accord exprès du salarié concerné, sur un emploi d'une catégorie inférieure.

 

et rien d'autre...

 

Pourtant, comme le font remarquer les auteurs de la proposition de loi :

 

"plusieurs jurisprudences ont imposé que les entreprises offrent, quand elles en disposent, des postes à l’étranger, dans le cas d’un groupe international notamment.
Si tel n’est pas le cas, le plan ainsi que les licenciements subséquents peuvent être annulés.

A contrario certains employeurs utilisent systématiquement cette possibilité pour se « débarrasser » à bon compte de leurs obligations légales sachant pertinemment que les offres ainsi faites seront refusées par les salariés et le plan de reclassement validé par les autorités judiciaires."


Pour faire simple, vous avez sûrement déjà entendu parler de ces belles offres de reclassement dans une entreprise d'un groupe international pour un emploi situé à quelques kilomètres dans un joli pays en appliquant de merveilleuses conditions de travail.

Je vous laisse chercher les exemples ; ils ne manquent pas.

 

Les députés ajoutent que :

 

"L’ambigüité de la rédaction de la loi actuelle permet donc aux employeurs de faire des propositions de reclassement :

 

­ dans des pays étrangers, et notamment, dans des pays émergents ;

 

­ à un niveau de rémunération dérisoire.


Face à ce constat, une modification législative visant à combler la lacune semblait nécessaire."

 

Le texte fut rapidement renvoyé  pour examen à la commission des affaires familiales, culturelles et sociales.

La discussion sur le sujet fut rapide mais efficace et l'article unique, un peu modifié, adopté.

 


La discussion en séance publique eut lieu le jeudi 25 juin 2009 et le mardi 30 juin 2009 ; le texte fut adopté en premier lecture.

 

Ne restes plus alors, pour respecter la fameuse navette parlementaire, qu'à refiler la proposition de loi aux sénateurs ; transmission effectuée le jour même de l'adoption par les députés.

 

 

Sans bien pouvoir expliquer pourquoi (on ne trouvait peut-être plus la clé du tiroir où se trouvait le document), le texte fut enfin étudié par la commission des affaires sociales du sénat le 27 avril 2010 et la discussion en séance publique date du 4 mai 2010 ; jour où les sénateurs adoptèrent le texte sans modification.


 

Que dit le texte ?

 

L'unique article de la proposition de loi proposait tout d'abord d'ajouter les mots "assorti d'une rémunération équivalente" à la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 1233-4 du code du travail.

 

De plus, les rédacteurs du texte ajoutent un article L. 1233-4-1.

 

Et tout cela donne une sous-section consacrée à l'obligation d'adaptation et de reclassement en cas de licenciement économique ainsi modifiée :

 

Art. L.1233-4


Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéresse ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

 

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

 

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.



Art. L. 1233-4-1


Lorsque l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national, l'employeur demande au salarié, préalablement au licenciement, s'il accepte de recevoir des offres de reclassement hors de ce territoire, dans chacune des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.

 

« Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions susmentionnées, pour recevoir de telles offres dans un délai de six jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l'employeur. L'absence de réponse vaut refus.

 

« Les offres de reclassement hors du territoire national, qui sont écrites et précises, ne sont adressées qu'au salarié ayant accepté d'en recevoir et compte tenu des restrictions qu'il a pu exprimer. Le salarié reste libre de refuser ces offres. Le salarié auquel aucune offre n'est adressée est informé de l'absence d'offres correspondant à celles qu'il a accepté de recevoir

 

 

Restes à suivre encore un peu la vie de ce texte avant son entrée en vigueur mais aussi après notamment les interprétations susceptibles d'être faites et la jurisprudence qui va suivre.

 

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30 avril 2010 5 30 /04 /avril /2010 13:00

Quasiment une semaine sans un mot ici ou ailleurs...

Presque sept jours sans prendre la plume (ou plutôt le clavier) pour noircir du papier (ou plutôt multiplier les caractères)...

 

Pas envie de sauter sur la moindre affaire touchant de près ou de loin un petit bout de tissu à la mode pour faire un pseudo-article sur le sujet surtout quand certains le font déjà beaucoup mieux que moi...

 

Pas assez de volonté pour m'attarder pendant un instant sur un ministre qui, voulant aller toujours plus vite, porte atteinte à la vie privée et à la présomption d'innocence et refile le joli cadeau à l'un de ses collègues...surtout quand d'autres sont meilleurs en la matière.

 

 

Pas la motivation pour passer en revue le commentaire du commentaire sur ceci ou cela...

 

Pas de temps pour disserter sur ceux qui, à défaut de trouver ce qui leur plait dans les textes en vigueur, veulent tout faire évoluer dans le sens qui leur va...

 

 

Ras le bol des triangulaires au second tour des élections... il faut changer cela au plus vite

 

On ne peut pas sanctionner une photo où un homme utilise le drapeau français... Qu'on invente un texte pour que cela devienne possible...

 

On ne peut même pas retirer la nationalité française quand bon nous semble... le droit est vraiment mal foutu... modifions-le...

 

Le Conseil d'Etat avise tout le monde que l'interdiction générale du port du voile intégral risque de poser des problèmes juridiques... Pas grave, soyons prêt à prendre des risques...

 

Un texte rédigé suite à un long débat avec un vote éclairé... trop risqué... trop d'amendements en perspective... mieux vaut une procédure d'urgence...

 

Pas la nécessité d'écrire sur ceux qui s'agitent plus qu'ils n'agissent...

 

[...]

 

"(ensemble), tout devient possible" qu'il disait...

 

 


 

 

Voir aussi :


la (quasi) semaine spéciale burqa de Maitre Eolas :

Cachez moi cette burqa avec laquelle vous ne sauriez voir

Peut-on conduire habillé ?

L'interdiction de la burqa dans l'espace public

 

Peut-on conduire avec un niqab ? par Michel Huyette

 

Tant va la loi à la burqa qu’à la fin elle se froisse chez Diner 's room


à écouter :

 

le constitutionnaliste Dominique Rousseau au micro de France inter

 

et bien d'autres encore...

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23 avril 2010 5 23 /04 /avril /2010 13:00

Une commerçante de Falaise dans le Calvados condamnée à une amende de 1.000 euros avec sursis, pour avoir vendu une bouteille d’alcool en novembre à une collégienne de 14 ans.
Une amende avec sursis : c’est un jugement clément, un rappel à l’ordre me direz-vous.

Oui, surtout, que pour ces faits constitutifs depuis peu d'un délit, la peine peut aller jusqu'à 7500 euros d'amende.
Oui et alors, c'est la loi...



Le tribunal correctionnel de Toulouse condamne un père à cinq mois de prison, dont trois avec sursis, et à verser 1.500 euros à la victime au titre de préjudice moral pour avoir frappé la conseillère d'éducation.

En effet, le 10 mars, une jeune fille de 16 ans, élève dans un collège, se fait virer pour indiscipline de son cours d'anglais. En pleurs, elle appelle papa, lui expliquant qu’elle a été frappée. Celui-ci se précipite sur place, trouve sa fille bouleversée, qui lui désigne la CPE comme l'auteur de la gifle, et le père va s’en prendre à elle, lui collant une gifle. Appel de la police, qui arrive dare-dare. Arrestation car flagrant délit, commissariat, garde-à-vue, auditions, présentation au procureur qui renvoie l'auteur des faits nerveux devant le tribunal correctionnel dans le cadre de la procédure de comparution immédiate, et le voilà en prison. Il n’a pas fallu 48 heures...

La victime, n’a pas eu le temps de s’organiser pour faire valoir ses droits, donc le tribunal renvoie l’affaire à un mois, pour jugement. Mais en attendant, le père reste en taule.

Et voilà que la sanction tombe...

Vous me répondrez qu'il a quand même frappé une personne, que la peine encourue pour un acte de violence volontaire est au minimum de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende (sans prendre en compte les éventuelles circonstances aggravantes.)

Vous me direz aussi qu'après tout il s'agit là d'une peine privative de liberté inférieure à deux ans (sans doute les plus désocialisantes) susceptible de faire l'objet d'un aménagement avant l'incarcération ; encore faut-il que les conditions soient réunies et notamment que la personne condamnée puisse justifier d'une activité professionnelle ou d'une d'une assiduité à une formation ou encore de sa participation essentielle à la vie de la famille,...


Vous me répondrez surtout que c'est la loi : quand on fait quelque chose de répréhensible, on peut prendre le risque de se faire sanctionner et puis nul n'est sensé ignorer la loi.

 

 

Alors là, je devrais théoriquement faire un petit paragraphe pour dire quelques mots sur le fait qu'on entend un peu partout que la justice est laxiste, que les juges sont plutôt sympas avec les délinquants, qu'il est temps de redresser la situation... et là, j'écrirais quelques lignes pour montrer que, notamment avec ces deux exemples, on se rend vite compte que la réalité est sans doute ailleurs...
Mais passons rapidement là dessus...
Attardons nous sur un autre point...

 

La loi c'est la loi et nul n'est sensé l'ignorer
mais, en fait, elle est faite par quelques personnes (nos gentils représentants) qui décident, selon des critères bien subjectifs, ce qui est bon ou mauvais pour notre société, dans l'intérêt général...

 

En ces temps où l'inflation législative n'est plus une mode mais une manière de laisser croire qu'on agit, posons nous juste quelques instants :

Il existe en droit pénal un principe dit de stricte nécessité des délits et des peines qui se trouve garanti entre autre par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen,

Mais que faut-il en conclure ?

 

 

 

Du côté des incriminations, le principe suppose que des actes doivent être sanctionnés que si cela s'avère nécessaire.

 

Un jour, on se dit qu'il semble nécessaire de prendre en compte certains actes, qu'il faut prévoir les conséquences quand certains faits sont réalisés...

 

Et alors ?

Alors, on peut tout d'abord se dire que, moralement, ce n'est pas bien mais peut-être pas besoin de mêler le droit à tout cela.

Ensuite, on peut penser qu'il faut une réponse juridique lorsque les actes sont commis mais pourquoi vouloir presque toujours pénaliser ces comportements ?

Le fait de vendre de l'alcool à un mineur devait-il forcément devenir un délit ?

Si on voulait vraiment agir, l'application du droit civil, notamment sur le fondement de la faute, ne peut-il pas suffir ?

 

On remplit un peu trop facilement le code pénal ces derniers temps, on pénalise à tour de bras, de nombreux comportements deviennent des infractions ; quand ce ne sont pas des textes qui viennent faire double emploi avec la législation en vigueur...

Alors, tout cela est-il vraiment strictement nécessaire ?

 

 

 

Du côté des sanctions, le principe se traduit par une sorte de calcul de proportionnalité.

Punir ni plus ni moins qu'il n'est nécessaire.

Et là encore, il est permis de s'interroger...

 

 

 

Et même si les faits sont constitutifs d'une infraction, est-on obligé de toujours les poursuivre, d'appliquer la loi sans autre considération ?

Heureusement que non et que le parquet dispose de l'opportunité des poursuites
mais alors fallait-il renvoyer ce père de famille devant le tribunal correctionnel ?

 

Si la réponse est affirmative, fallait-il prononcer une telle peine alors pourtant que le juge dispose d'un large pouvoir d'individualisation comme le rappelle l'article 132-1 du code pénal :

 

"Dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.

 

La nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions"

 

Pourquoi, alors que de nombreuses solutions alternatives existent, avoir préféré l'incarcération ?

 

Encore tant de pourquoi qui trottent dans ma tête...


 

La loi c'est la loi et nul n'est sensé l'ignorer mais il n'est pas encore interdit de réfléchir, de se poser des questions, de la contester ou simplement de la critiquer...

 

D'ailleurs, vous savez ce que Georges en pense de la loi ?

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23 avril 2010 5 23 /04 /avril /2010 07:40

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Au départ, il y a la fnac de Nice qui organise un concours de photographie sur le thème du "politiquement incorrect".
Puis, le jury de professionnels a désigné un cliché comme le coup de coeur et du coup, le gagnant a le droit à un peu de publicité et notamment la chance de figurer dans l'édition locale du journal Métro.

 

Une photo qui en revanche n’a pas été au goût de certains lecteurs qui se sont indignés. Le député UMP du conseil général des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti a lui alerté la ministre de la Justice, Michelle Alliot-Marie sur cette affaire "outrageante", selon lui, pour le drapeau français. Il lui a demandé d’envisager des poursuites.

 

Vient alors le communiqué de la Garde des sceaux :

 

"Michèle Alliot-Marie déplore la diffusion d'une photographie montrant un homme s'essuyant le postérieur avec le drapeau français et étudie les moyens juridiques de sanctionner ce type de comportement intolérable. Michèle Alliot-Marie a demandé que des poursuites pénales soient engagées contre cet acte inadmissible"

 

 

Oui mais quel fondement légal pour poursuivre ?

Si on écoute ceux qui s'expriment sur le sujet, il s'agit là d'un outrage au drapeau.

 

Article 433-5-1 du code pénal

Le fait, au cours d'une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques, d'outrager publiquement l'hymne national ou le drapeau tricolore est puni de 7 500 euros d'amende.

 

Lorsqu'il est commis en réunion, cet outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.


Rien que la lecture du texte prouve que le texte n'est pas applicable en l'espèce mais, au cas où cela ne suffirait pas, précisons que le Conseil Constitutionnel affirme dans une décision du 13 mars 2003 :

 

"Considérant que sont exclus du champ d'application de l'article critiqué les œuvres de l'esprit, les propos tenus dans un cercle privé, ainsi que les actes accomplis lors de manifestations non organisées par les autorités publiques ou non réglementés par elles"

D'ailleurs, le Procureur de la République de Nice Eric de Montgolfier, saisi des faits, a assez vite classé l'affaire sans suite.

 

Ajoutons également que les textes sur le sujet ne manquent pas :

 

article 10 de la Déclaration de 1789 : 
Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi

 

article 11 de la même Déclaration :
La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi

 

l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit la liberté d'expression on seulement pour les informations ou les idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'Etat ou une fraction de la population.

 

Du coup, la ministre de la justice, par l'intermédiaire de son porte parole, affirme vouloir faire évoluer le droit sur cette question...

 

 

Article 111-2 du code pénal

 

La loi détermine les crimes et délits et fixe les peines applicables à leurs auteurs.

 

Le règlement détermine les contraventions et fixe, dans les limites et selon les distinctions établies par la loi, les peines applicables aux contrevenants.

 

 

Autrement dit, si le ministère veut pouvoir agir directement, il ne peut que créer un règlement créant une contravention mais alors c'est sûrement la première juridiction administrative venue qui réglera le sort du texte.

 


 

La photo est nulle ? peut-être mais, si tel est le cas, ce n'est sans doute pas à la loi de le dire et puis, disons-le : niveau vulgarité, il y a sûrement pire ailleurs.

 

Pour moi, la photo est juste mauvaise mais je n'ai nullement envie de la voir disparaitre...

Il m'arrive aussi de prendre des mauvaises photos.

 

 


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22 avril 2010 4 22 /04 /avril /2010 17:40

Je ne voudrais pas être ministre dans ce gouvernement et notamment je ne voudrais pas être ministre de la justice en ce moment...

Pauvre Michèle Alliot-Marie !
Le président a voulu une réforme de la procédure pénale ;
elle est chargée de s'en occuper.

Ses services lui préparèrent un texte allant dans le sens voulu avec des points annoncés comme non négociables.
Elle le proposa aux membres du monde judiciaire pour recueillir leur avis.

 

 

Mais, rien ne va...

 

Avant même que l'avant projet de réforme ne soit rendu public, nombreuses sont les personnes qui critiquèrent le peu que l'on a bien voulu nous laisser savoir.
La rentrée solennelle de la Cour de cassation fut l'occasion pour plusieurs avocats, magistrats et autres intervenants du monde judiciaire de manifester leur hostilité mais aussi le moment que choisi le Procureur général près de la Cour de cassation pour rappeler quelques points de droit et mettre en garde le Premier ministre et le Garde des Sceaux sur le sujet.

 

Et lorsque la concertation commença enfin, les choses ne s'arrangèrent pas vraiment...

 

Certains refusèrent dès le départ d'y participer, d'autres quittèrent le navire pendant le voyage quasi en pleine mer...

La découverte de nouvelles dispositions donna de nouveaux arguments notamment la modification des règles relatives à la prescription.

Les juges de la Cour européenne des droits de l'Homme vinrent rappeler que le ministère public (tel qu'il est actuellement) ne peut-être une autorité judiciaire compétente au sens de la convention.
Mais madame le ministre résista et publia un communiqué allant dans un autre sens.

 

 

Et puis, les élections régionales ont lieu ; pas besoin de revenir sur les résultats
Le message des français fut soit disant entendu ; la décision fut prise : il faut arrêter de s'éparpiller, se recentrer, privilégier certaines réformes au détriment d'autres.
Et des bruits commencèrent à courir... la réforme semblait s'approcher de plus en plus du jour de sa disparition mais Michèle Alliot-Marie continua la concertation.

 

 

Ce fut alors autour des membres de la Cour de cassation de venir frapper l'avant projet de réforme qui n'est déjà quasi plus qu'un cadavre qui n'attend plus grand chose pour finir dans sa tombe :

 

Vendredi 16 avril 2010,  les magistrats du siège et du parquet ont rendu leur copie :

 

Voici quelques morceaux choisis :

 

l'avant-projet de loi "ne garantit pas suffisamment les équilibres institutionnels et l'exercice des droits de la défense et des victimes"


"Le contrôle de la garde à vue ne peut dépendre de l'autorité de poursuite"


"il ne paraît pas possible de confier à un parquet hiérarchisé, placé sous l'autorité du ministre de la Justice, ne bénéficiant d'aucune garantie statutaire nouvelle, les pouvoirs très étendus envisagés par l'avant-projet de réforme, soulignent-ils à leur tour. (…) Une telle réforme paraît incompatible avec le statut actuel des magistrats du Parquet"


"Les garanties nouvelles pour intéressantes qu'elles soient, ne sont pas de nature à compenser l'absence de réforme statutaire en matière de nomination, d'avancement et de mutation d'office, réforme indispensable à une meilleure garantie d'impartialité et à une plus grande confiance de la société envers les magistrats qui la représentent"

 

Ils s'attaquent également à la question du délai de prescription et réaffirment la jurisprudence développée au sujet des infractions clandestines en précisant que vouloir  modifier dans le sens prévu par le texte "serait contraire aux impératifs de lutte contre la grande délinquance"

 

Bref, encore un argument de poids pour ceux qui ne veulent pas de cette réforme.

 

D'ailleurs, l'avis des magistrats de la Cour de cassation a eu quelques conséquences : MAM a annoncé qu'elle renonçait à modifier les règles relatives à la prescription.

 

Un premier recul qui fait déjà penser à certains que la Garde des sceaux commençait à enterrer l'avant-projet de loi.

 

Et voilà que maintenant on lui demande de chercher un fondement juridique introuvable dans la législation actuelle pour poursuivre des faits injustement qualifiés d'outrage au drapeau... ; au besoin de créer une nouvelle infraction, et de préparer un texte visant à mettre en place une interdiction générale du voile intégral alors que le Conseil d'Etat a clairement précisé que cette hypothèse posait de nombreux problèmes juridiques...

deux sujets qui mériteraient bien au moins un article...

 

Pauvre Michèle Alliot-Marie ; je n'aimerais vraiment pas être à sa place en ce moment.


 

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22 avril 2010 4 22 /04 /avril /2010 06:54

Quelque part dans le Colorado. Un coin reculé de 36.000 âmes et 13 prisons. Prison Valley, c’est ça : un road movie intéractif dans une ville-prison où même ceux qui vivent dehors vivent dedans.

 

Ce webdocumentaire écrit et réalisé par le journaliste David Dufresne et le photographe Philippe Brault est un road-movie interactif d'un genre inédit, une plongée dans l'industrie carcérale américaine. Il va à la rencontre des habitants de Cañon City, bourgade paumée du Comté de Fremont dans le Colorado. Où même ceux qui vivent dehors, vivent dedans. Un complexe prisonnier – comme on dit complexe hôtelier – de 36.000 âmes et 13 prisons, dont Supermax, la nouvelle Alcatraz. Prison Valley met l'internaute au centre du débat, lui permettant de dialoguer directement avec les protagonistes du film, ou des intervenants extérieurs lors de forums thématiques. Images, sons, textes, documents ou posts enrichissent, au fil du temps, le récit en un passionnant débat collectif.

 


 

La justice a toujours été au coeur de la politique américaine, de son cinéma et de sa littérature. Prison Valley commencera, en quelque sorte, là où s'arrête Prison Break. Qu'est-ce que l'Amérique d'aujourd'hui ? Jusqu'où s'accommode-t-elle de ses propres folies ? Comment se regarde-t-elle ?

 

La dimension à la fois ordinaire et extraordinaire du Comté de Fremont, est centrale. La « vallée des prisons » offre des résonances contemporaines qui préfigurent l'avenir de notre propre société. Cañon City, c'est presque une ville modèle de ce que pourrait être le monde futur avec ses pénitenciers dernier cri, ses 16% de population incarcérée, et son Supermax, la prison des prisons, celle des Timothy McVeigh, Unabomber, Zacarias Moussaoui et tant d'autres.

 

Autrement dit : dans une société occidentale qui a fait le choix de l'enfermement, de la répression et du contrôle – plutôt que de la prévention et de l'éducation –, aller à Cañon City, c'est se plonger dans notre avenir. Ici, la crise économique, on ne connaît pas. Ou peu. Il n'y a pas de suppression d'emplois. « On ne remet pas les prisonniers en liberté quand l'économie va mal ». Ici, « la récession qui frappe l'Amérique » est amortie. Parce que derrière les murs, il y a 7 735 détenus et autant d'emplois stables directement liés à ce qu'il faut bien appeler par son nom : l'industrie de la prison.

 

Prison Valley raconte le mélange qui s'opère dans cette vallée du Colorado. Prison. Industrie. Rentabilité. Main d'œuvre. Détenus. Incarcération. Toujours, et encore. Prison Valley, c'est ça : un road-movie dans une « version clean de l'enfer ». Cette idée traverse tout le documentaire. Tout comme la tranquillité qui se dégage de ses personnages : la vallée de Cañon City est paisible. Elle renferme pourtant le pire de l'Amérique. Les internautes passeront sans cesse d'un extrême à l'autre, pour aller à la rencontre de ces protagonistes qui parlent volontiers. Comme le font les Américains, qui se savent confusément universels.

 


À la croisée du cinéma documentaire, de la photographie et de l'interactivité, Prison Valley se propose de renforcer la place du spectateur, en le remettant au coeur du débat. Une des promesses originelles de l'Internet.

 

Le récit principal autonome est un carnet de route au «nous» narratif, englobant d'emblée le spectateur. À différents noeuds de ce récit, des portes s'ouvrent sur des «zones interactives», chacune différente : débats, expériences, compléments. Des extensions qui se fondent totalement dans le corps même du récit, en se situant dans des éléments du décor naturel. Et lorsque l'internaute en ressort, il reprend l'histoire là où il l'a laissée.

 

Une première dans le cadre d'un webdocumentaire et du documentaire tout court : à intervalles réguliers, certains protagonistes du film seront disponibles pour discuter et répondre aux internautes. Connectés au programme, ils pourront prendre connaissance des questions qui leur sont soumises et apporter éclairage, réponses et réactions.

 

Avec Prison Valley, le spectateur n'est donc pas isolé. Il visualise les autres utilisateurs connectés. Il peut, à des moments choisis, les rencontrer, échanger et débattre durant son visionnage. Et participer aux débats dans les forums thématiques.

Des portfolios sonores permettent également de s'immerger encore davantage dans l'atmosphère de Prison Valley. Des séquences fortes qui se clôturent sur le recueil des impressions des internautes.

 

Prison Valley est appelé au fil du temps à s'enrichir des débats qu'il va susciter : analyses, chiffres clés, études prospectives, tribunes, interviews, etc. Sociologues, philosophes, économistes et responsables politiques seront invités à réagir. Le programme va également largement communiquer avec le public, en privilégiant les réseaux sociaux FaceBook et Twitter.


 

http://prisonvalley.arte.tv/

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16 avril 2010 5 16 /04 /avril /2010 12:00

Cet article n'est que pure théorie, rien que l'intitulé le prouve...


 

J'ai lu récemment un article sur le site de rue89 dans lequel il était question d'une affaire tout ce qu'il y a de plus banal en théorie..., j'ai fait tout de même quelques recherches pour en savoir un peu plus.


Une chaîne de télévision française (en l'occurrence Canal +) avait pour projet de diffuser un téléfilm en plusieurs parties sur la vie d'un homme.
Ce dernier, apprenant la nouvelle, assigna en référé la chaîne de télévision ainsi que la société de production car il estimait que le film portait atteinte à son droit à l'image et à la présomption d'innocence.
Son avocate demanda de pouvoir voir une copie et de suspendre la diffusion pendant trois mois ; le temps que son client puisse faire des observations. Elle ajouta qu'il ne s'agissait pas d'une censure ou d'une tentative d'interdiction mais simplement du respect du droit.

 

 

L'avocat du producteur invoqua un argument largement admissible :
"Personne n’a jamais obtenu satisfaction sur le terrain du contrôle préalable, on n’attaque pas une œuvre avant sa diffusion... cela n’a aucun sens, c’est comme si pour faire un livre sur Ben Laden il fallait son accord"

 

Le jugement est allé dans ce sens en déclarant que la demande faite constituait une mesure injustifiée radicalement contraire à la liberté d'expression.

 

On reconnaît là l'influence de la cour européenne des droits de l'Homme.

En effet, l'article 10 de la convention fixe comme principe le droit pour chacun à sa liberté d'expression tout en précisant que celle ci peut être limitée dès lors que la loi le prévoit, que l'ingérence poursuit un des buts légitimes prévus et que cette limitation est nécessaire dans une société démocratique.

Reste à d'interroger sur la décision rendue au regard e ses éléments...

 

Imaginons juste un instant que l'on fasse un film sur vous de votre vivant, quelle serait votre première réaction ? ne voudriez vous pas visionner le film avant sa diffusion au public pour au moins vérifier l'image que l'on donne de vous ?

 

Précisons que dans ce cas l'homme en question s'appelle Ilitch Ramirez Sanchez (mieux connu sous le nom du terroriste Carlos) et que le film vise à relater son existence.

Cela change quelque chose pour vous ?

En lisant certains commentaires suite à l'annonce de cette nouvelle, il est permis de se poser la question.
Et pourtant, l'interrogation n'a pas de raison d'être...

 

Un détenu reste un homme comme les autres, il est juste privé de sa liberté d'aller et venir... et, théoriquement, rien d'autre...sauf en cas de peine complémentaire entraînant une situation différente
Tous ces autres droits demeurent ; à commencer par le droit de les faire respecter.
Ce n'est pas parce qu'un homme est derrière des barreaux que sa vie entière s'arrête ; n'en déplaise à certains...

Un détenu peut théoriquement s'instruire, suivre des formations, faire du sport, se cultiver, travailler, correspondre,se marier, avoir une vie privée et familiale (même s'il est permis de s'interroger sur les conditions d'exercice de ce droit), peut faire respecter ses droits devant la justice...

 

Cela, Carlos l'a vite compris et il a su avoir recours à la justice quand cela lui semblait utile ; il a ausi offert à la jurisprudence quelques décisions devenues célèbres pour certains juristes.

 

 

Il y eu tout d'abord son retour en France un peu prématuré qui donnera lieu à un arrêt de la cour de cassation du 21 février 1995 dans lequel la chambre criminelle valide la procédure au cours de laquelle les autorités soudanaises, en dehors de toute convention, auraient gentiment remis l'individu à la France ; son interpellation n'ayant eu lieu que sur l'aéroport de Villacoublay dans les conditions prévues par le code de procédure pénale.

Bref, un miracle : le Soudan décide de mettre hors de son territoire Carlos et les autorités françaises le retrouvent presque par hasard sur le territoire national suite à une information reçue par un commissaire de la DST.

 

Le même fait a eu le droit a un passage devant la commission européenne des droits de l'Homme.

Les juges de Strasbourg ont alors eu une magnifique argumentation pour conclure qu'il n'y avait pas eu de violation de l'article 5 de la convention : il n'y a pas eu d'activité illégale des autorités françaises à l'étranger puisqu'il existe le consentement de l'Etat soudanais...

Bref, pour  eux, le principe de consentement de l'Etat va suffir à permettre une action des autorités d'un autre Etat alors que la plupart des droits internes exigent une convention ou au moins un certain formalisme ; ne serait ce que pour respecter un fameux principe de souveraineté.

 

 

 

Ilitch Ramirez Sanchez a encore sollicité la justice pour une toute autre affaire.

Il s'agissait cette fois de la question de la mise à l'isolement.

Théoriquement, il ne s'agit pas d'une mesure disciplinaire : ce n'est pas destiné à punir mais seulement à mettre à l'écart pour des raisons de sécurité ; l'individu n'est privé ni de correspondance ni de visites ni de promenades mais seulement des activités en contact avec d'autres détenus.

Mais dans les faits, il s'agit bien souvent d'une sanction déguisée surtout que peu de prisons ont un quartier d'isolement différent du quartier disciplinaire...et là , le détenu ne peut pratiquement plus travailler et n'a quasiment plus de contact humain, bref, totalement désocialisant, et cela peut durer plusieurs mois voire même plusieurs années... 8 ans pour monsieur Ramirez Sanchez....

 

Mais la cour européenne des droits de l'Homme n'a pas condamné la France pour violation de l'article 3 car l'exclusion d'un détenu de la communauté carcérale ne constitue pas un un traitement inhumain mais un isolement sensoriel et social total peut détruire la personnalité et ne saurait se justifier par une exigence de sécurité ou toutes autres raisons.

En l'espèce, les juges ont décidé qu'il n'y avait pas d'isolement sensoriel et social total donc pas de traitements inhumains et dégradants.

 

Pour finir par une note plus positive, notons que Carlos a au moins pu bénéficier d'un de ses droits : celui de se marier et son épouse est également son avocate...

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